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2023 ? La trêve des déconfits ?

Cette année, la trêve des confiseurs débouchera-t-elle sur une trêve des déconfits ? Au premier jour de 2022, qui d’entre nous aurait pu pronostiquer ce que réservait au monde l’année qui commençait ? Pas plus qu’en 2021, personne n’aurait pu conjecturer que, le 6 janvier, le Capitole de Washington serait envahi par les légions d’un candidat dictateur fou. En 2022, c’est la date clef du 24 février qui a démasqué le tyran russe pour ceux – rares et obnubilés – qui avaient encore le moindre doute à son propos.

La barbarie déconfite

Qu’espérer d’autre, pour 2023, sinon une trêve obligée pour le grand déconfit de l’année ? Vous voyez qui ? Est déconfit, au sens vieilli du terme, celui qui est « battu, défait ». L’emploi moderne et figuré le voit « penaud, dépité ». L’« empereur de toutes les Russies » est tout cela à la fois. La déconfiture, déjà actuelle, de son personnage et de son régime ne pourra que se confirmer. Son « opération spéciale », destinée à « régler le problème ukrainien » en « dénazifiant » l’Ukraine, devait se boucler dans de courts délais pour magnifier « la force tranquille de la Russie ».

Or, le conflit franchira bientôt sa date d’anniversaire et ne connaîtra sans doute pas une issue proche. Poutine-le-déconfit a perdu la face – et comment la sauverait-il désormais ? – aux yeux du monde, mais aussi d’un nombre croissant de ses compatriotes. Ses soubresauts médiatiques panachés de menaces nucléaires ne convainquent plus que lui-même et son contingent d’inconditionnels. De son vivant, il a déjà pris place dans la galerie des chefs d’État criminels de guerre. Seule la trêve lui ménagerait un refuge, sans lui garantir de garder le pouvoir. L’Histoire répète qu’en général l’échec militaire se double d’une débâcle politique.

La violence déconfite

À une autre échelle, la violence quotidienne s’est invitée plus communément dans notre société. Peut-être là aussi ses adeptes auront-ils la lucidité de constater leur faillite pour reconnaître la vertu des trêves et de la paix.

Inspirés ou non par des « modèles » étrangers, certains politiques bien de chez nous semblent avoir fait de l’agressivité, voire de l’agression, leur cheval de bataille. Ils s’en prennent aux idées comme aux personnes à coups de déclarations tapageuses et de « petites phrases » fielleuses. Ils tonitruent et dénoncent, en dépit des engagements pris. Découvriront-ils, en 2023, à quel point leur « méthode » est stérile et dommageable dans la quête du bien commun ? Trêve de chicaneries ! Place à la négociation raisonnée.

Pourquoi les agressions contre les forces de l’ordre, les services de secours, les médecins se sont-elles multipliées au point de créer chez certains de ces acteurs un climat d’insécurité permanente ? Que se passe-t-il dans l’esprit de celui qui malmène, en paroles ou en actes, une personne venue pour secourir ? Le brutal se fait-il son propre justicier parce qu’il estime son droit bafoué ? Perd-il toute maîtrise, submergé par l’intolérance de plus en plus aiguë à toute frustration ? Et si, en 2023, il faisait la trêve, laissant agir en paix ceux qui œuvrent pour la paix…

Dans la façon de nous adresser les uns aux autres, la violence s’est aussi immiscée et banalisée. Un coup d’œil suffit sur des forums de discussion, partout où s’envoient des messages pour le constater : dureté, colère et excès envahissent le terrain. Débat rime avec combat. Dialogue éclaté et voué à l’échec. Les atrabilaires, déconfits, feront-ils, eux aussi, la trêve en 2023 ? Des propos, même contradictoires, pourront-ils s’échanger dans la paix vers une vérité commune ?

Pourquoi tous ces avatars de la violence du haut jusqu’au bas de l’échelle ? C’est comme si, trop souvent, l’individu se croyait seul au monde, cramponné à son seul point de vue, incapable de s’élargir à la vision des autres. Une trêve de l’individualisme est-elle concevable ? 2023 est une autre année. Ce pourrait être l’année de l’Autre.

Écrit au moment des vœux de Nouvel An, ce texte n’a pas trouvé grâce auprès des éditeurs éventuels.

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